Les petits poissons d’Odette

Douleur lors d'un accouchement en plateau technique

7 novembre 2015

Cette grossesse est marquée par une énooooorme flemme, qui a plutôt bien fichu à l'eau mon projet de vous raconter sur ce blog mon projet d'accouchement en plateau technique avec une sage-femme libérale.

Mais comme en ce moment, je suis en train de suivre les séances de préparation à la naissance avec elle, et que la naissance n'aura lieu que dans quelques mois, je peux tenter de prendre quelques notes ici. Je les relirai en janvier, quand les choses sérieuses se rapprocheront.

Cette semaine, j'ai eu la séance sur la gestion de la douleur lors de l'accouchement. Et, dans le cas qui me concerne, ce que l'on peut faire pour cette douleur dans le cas d'un accouchement avec une sage-femme libérale (physio ou pas).

Physiologie vs. médicalisation et accouchement avec sage-femme libérale

Ma première découverte de la séance, c'est que je ne suis pas « obligée » d'avoir un accouchement physiologique pour accoucher à la maternité avec cette sage-femme. Je pensais que « accouchement en PT » <=> « accouchement physio », et que si la condition « physio » sautait (demande/besoin de péri, de morphine, etc.), la responsabilité de la sage-femme sautait aussi, avec son accompagnement et la complicité que nous avons mise en place patiemment ces derniers mois.

Mais en fait, dans cette maternité, c'est possible. Il suffit que la sage-femme soit d'accord, et la mienne l'est. Elle a bossé plusieurs années dans cette maternité avant de passer en libéral, ça aide à ce que la maternité lui fasse confiance : la sage-femme libérale connaît les lieux, les usages et l'équipe sur place qui la connaît et l'apprécie.

Le fait d'être dans un environnement hospitalier autorise de s'écarter légèrement du chemin de la physiologie, ce que ne permettrait pas forcément un accouchement à domicile. Si on reste dans de la « petite » médicalisation (morphiniques, péridurale, etc.) elle garde la responsabilité même si l'anesthésiste intervient.

En cas de pathologie (besoin de forceps, de césarienne en urgence), elle « perd » la responsabilité mais elle reste sur place. Soit pour m'accompagner (parce que de toute façon c'est l'obstétricien qui fera le forceps, par exemple), soit pour donner un coup de main (pour le ballet d'une préparation de césarienne en urgence).

Il existe d'autres sages-femmes qui se cantonnent à la physiologie et préfèrent passer la main dès que l'on commence la médicalisation. Cette exigence peut venir de la maternité qui ouvre le plateau technique : c'est une question à poser en début de suivi. Je ne l'ai pas posée, j'avais supposé la réponse, et j'étais donc partie sur un projet de physio « pure et dure ».

Maintenant que je sais que j'ai « droit » à la péridurale, j'ai toujours l'intention de tenter la physio… Et je me dis que ça marchera probablement mieux parce que j'aurai moins la pression. Magie des portes ouvertes. (En métaphore, hein. En vrai, le jour J, je pense que je préfèrerai que la porte de la salle d'accouchement soit fermée. Quand même.)

Petit point sur la péridurale

On a refait un petit point sur la péridurale, ses avantages, inconvénients, et les aspects pratiques.

Avantages :

  • ça calme la douleur (en général),
  • ça peut assouplir le col et « décoincer » le travail dans certains cas.

Inconvénients/effets secondaires :

  • ça calme aussi les contractions (donc nécessité de « relancer la machine » avec du synto dans 2/3 des cas environ).
  • Ça réduit la liberté de mouvement puisqu'on ne peut pas bouger les jambes.

Aspects pratiques :

  • On ne peut la poser que quand le travail est « vraiment lancé », après 3 cm de dilatation du col.
  • Ya deux-trois trucs à préparer avant la pose de la péri. Je me rappelle juste de la perf qui sert à augmenter la tension et de l'anesthésiste qui désinfecte le dos.
  • Le temps de préparer l'anesthésie, de la poser et qu'elle agisse, il se passe facilement 30 à 45 minutes. Donc si on est proche de la poussée, on ne pose pas la péri.

Elle m'a montré l'aiguille qui sert à la pose et le petit tuyau qui reste dans la colonne après. Malgré la longueur de l'aiguille, je suis même pas tombée dans les pommes. #fière

(Elle m'a aussi montré le système aiguille/cathéter qui sert pour les perfusions, justement. Je comprends vachement mieux le fonctionnement du truc quand la personne ne s'apprête pas à planter tout ça dans mon poignet. En fait.)

« À quoi sert la douleur ? » ou « Mais en fait, pourquoi tu veux accoucher sans péri ? »

La sage-femme a commencé par me demander « à quoi ça sert la douleur ? » et tout ce que j'ai trouvé à répondre, c'est que ça servait à réguler naturellement les naissances.

Il en ressort que j'avais confondu « douleur » et « souffrance ». La douleur est normale, d'une intensité variable, mais tant qu'on arrive à la gérer, qu'on n'est pas submergée, on n'est pas en souffrance. Un bon accompagnement aide à supporter la douleur, plus qu'à la soulager.

J'y vois un parallèle entre le « bon stress » ou la « bonne peur » qui donnent des super-pouvoirs, et le mauvais stress ou la mauvaise peur qui nous rendent flageolants et nous font perdre tous nos moyens. Le bon stress, on l'exploite pour devenir meilleur dans les situations stressantes (on se prépare mieux à un examen, on est plus alerte) plutôt que de s'astreindre à l'ignorer (ce qui ne marche pas et… tend à le transformer en mauvais stress).

La douleur, donc, pas la souffrance, peut servir de guide pendant l'accouchement : si telle ou telle position fait mal, c'est que le bébé est « bloqué » donc on va bouger. Et plus on bouge, plus le bébé va sortir vite… Donc plus on a mal, moins on a mal longtemps. Ça a l'air cool. Ça donne presque envie d'avoir mal. (Mais tout est une histoire de mesure, hein.)

Ensuite la sage-femme a reformulé la question en « pourquoi tu veux accoucher sans péri ? ».

Là j'avais deux réponses. Ma première était une réaction pure à ma première péri que j'ai « payée » cher (quelques heures sous synto sans accompagnement, autrement dit une grande souffrance). Mais j'essaie de voir cette grossesse et cet accouchement pour eux-mêmes, pas en simple réaction à ce qui s'est mal passé sur les premiers. Ça joue mais je ne veux pas que ce soit la raison principale. Finalement, je veux un accouchement physio… par curiosité ? Pour me prouver que je peux y arriver, et mon corps aussi ? Un peu de tout ça.

La douleur pendant les différentes phases de l'accouchement physiologique

1. Le début du travail, de 3 à 6 cm

Pendant cette phase, il est important de « rentrer dans ma bulle ». L'utérus contracte sous l'effet de l'ocytocine, ça fait mal, le cerveau compense en générant des endorphines, c'est cool, ça fait encore plus d'ocytocine, plus de contractions, plus d'endorphines.

Si on me stimule intellectuellement pendant cette phase, ça va me faire sécréter de l'adrénaline et tout casser le cercle vertueux de la drogue autogénérée par mon cerveau ci-dessus.

À faire : SE REPOSER entre les contractions, voire dès la fin du pic de la contraction, rester au calme, proposer une ambiance familière, varier les positions…

Axe de réflexion au préalable : si j'ai mal, par exemple pendant les règles, ou en cas de maux de tête, comment je gère la douleur ? Est-ce que j'ai besoin de râler sur mère nature ? De mettre un gros pyjama moche en pilou, m'emberlificoter dans un plaid et d'éteindre la lumière ? Est-ce que j'aime bien les massages dans ces situations-là ? Essayer de prévoir la logistique en fonction de ces réflexions (mettre une bouillotte, un plaid et le vieux T-shirt moche dans la valise, expliquer au conjoint qu'il aura peut-être quelques massages à faire, etc.).

2. Le pétage de plombs, de 6 à 10 cm

C'est la partie que je connaissais sous le nom de « phase de désespérance », la fin de la dilatation du col. Les contractions sont plus costaud qu'au début, le bébé appuie fort sur le col. C'est une phase, m'explique la sage-femme, où certaines femmes « pètent un plomb » et insultent tout ce qui passent, ou pleurent et hurlent… Mais la plupart se contentent d'un « oh pff chuis fatiguée, j'en ai marre… ».

À faire : lâcher prise, écouter ce que « demande » le corps et le faire. Y compris si c'est se mettre à quatre pattes et hurler des insanités (sic). Continuer de varier les positions, et tenter d'autres techniques pour soulager la douleur (qui n'auront probablement pas encore été tentées sur le début).

Je crois me souvenir que dans cette phase-ci, c'est le cerveau reptilien qui prend le relais, et dans la phase précédente c'était le cerveau limbique. Cela dit j'ai un peu de mal à différencier les différentes couches de cerveau, à part le cortex préfrontal parce que j'ai joué au Dr Kawashima quand j'étais petite. Et le cortex préfrontal, je sais qu'il n'a absolument rien à faire à mon accouchement.

Réflexion préalable à creuser : comment on gère l'inconnu, les surprises (une voiture nous fait une queue de poisson sur l'autoroute : on l'insulte ? On ouvre la fenêtre pour avoir de l'air ? On met de la musique ?).

(Je réfléchis à ces questions en écrivant l'article : quand on me fait une queue de poisson, j'insulte le mec et j'ouvre ma veste ou mon gilet pour avoir moins chaud. Est-ce qu'à 8 cm je vais donc me mettre à poil pour insulter mère nature ? ô_Ô J'espère que mon mari et la sage-femme auront une amnésie subite et sélective. Au cas où, je note sur ma todo list de prévenir mon mari que je vais peut-être me transformer en Hulk.)

3. La descente du bébé dans le bassin (le yo-yo)

Cette période est beaucoup plus calme que la précédente. En général, on est dans une position pas trop fatigante, sur le côté ou sur un ballon… Le col, complètement dilaté, ne « lutte » plus contre la sortie du bébé. C'est désagréable mais moins douloureux que la fin de la dilatation. Le bébé, par un mouvement de va-et-vient, descend petit à petit à travers la sortie.

À faire : je ne sais plus ce qu'elle m'a dit. Je me souviens qu'au premier accouchement, j'ai accompagné les contractions en soufflant longuement et en contractant ce qui me restait d'abdos. J'ai effectivement le souvenir d'une phase « tranquille » après les larmes qui avaient précédé et le coup de rush qui allait suivre. J'étais sur le côté, je sentais des trucs assez inédits dans mon ventre et j'appelais la sage-femme de garde toutes les 10 minutes pour lui dire que j'étais en train de faire caca. (Sauf qu'en fait non.)

4. Tout le monde dehors

Au moment où le bébé s'approche de la sortie pour commencer à appuyer sur le périnée, le réflexe de poussée se déclenche. Donc on pousse. Par réflexe. Tout cela est accompagné d'une décharge d'adrénaline pour réoxygéner un peu tout le monde.

À faire : suivre le réflexe. Pour aider à l'ouverture du périnée, on peut appliquer des compresses chaudes… il faudra probablement le rappeler à la sage-femme le moment venu.

Photo : Hulk vs. Yoda CC-BY JD Hancock

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